En mars dernier, le Bureau national chinois des statistiques a publié des données macroéconomiques internes montrant que les principaux indicateurs économiques sur la production industrielle, la production de services et les biens de consommation de base des deux premiers mois se sont améliorés par rapport au mois de décembre de l’année dernière. Toutefois, la Chine subit encore une grande pression économique, avec un taux de chômage qui a atteint 18,1% pour les 16-24 ans. En plus de cela, des défis se posent aussi sur la relance du secteur immobilier, et sur le rétablissement rapide de la confiance des consommateurs et des investisseurs privés – domestiques ou internationaux – vis-à-vis du marché chinois.
Si la Chine souhaite maintenir sa stabilité économique et sociale, elle doit continuer de « s’ouvrir au monde », ce qui a d’ailleurs été très récemment souligné dans les discours officiels chinois. Le retour récent de Jack Ma en Chine, après plus d’un an de séjour à l’étranger, semble également transmettre un bon message au secteur privé. « En ce moment, on assiste à une phase de séduction de la part des autorités chinoises, qui envoient énormément de messages positifs pour attirer les investissements étrangers. Il y aura certainement des provinces ou des villes chinoises qui feront des listes de facilitation pour l’implantation des entreprises étrangères », observe Christophe Lauras, président de la CCI France Chine et directeur des opérations du groupe Accor en Chine.
Toutefois, « ce sera un grand défi pour le gouvernement chinois dans les prochaines années de montrer aux investisseurs étrangers que la prévisibilité existe et est possible en Chine, et de se donner un mode d’emploi fiable », commente Ludovic Weber, directeur de la région Asie-Pacifique de Saint-Gobain. « Ces trois dernières années nous ont aussi rappelé que la Chine pouvait être imprévisible. Même s’il peut être possible d’expliquer a posteriori nombre de ces décisions en se rattachant à des grandes lignes directrices, les décisions prises concernant l’industrie technologique, l’éducation, ou encore le Covid, sont lues par les investisseurs étrangers comme une grande imprévisibilité des affaires », poursuit-il.
En dépit de quelques facteurs incertains, la reprise de l’économie chinoise pourrait s’accélérer et atteindre un taux de croissance de 5,7% en 2023, selon un rapport récent de KPMG Chine. Dans tous les cas, le marché chinois reste incontournable pour de nombreuses entreprises occidentales. Malgré l’influence des enjeux géopolitiques sino-américains, le potentiel des affaires franco-chinoises reste encore à explorer. Comme le décrit Christophe Lauras : « Je vois beaucoup d’opportunités pour les entreprises françaises qui souhaitent se développer en Chine. Elles ont une vraie valeur ajoutée dans différents domaines comme le luxe, les secteurs aéronautiques ou agroalimentaires… ou encore, dans le développement durable et la décarbonation de l’économie, où les entreprises françaises de différentes tailles développent beaucoup de technologies, possèdent des processus testés et approuvés et un vrai état d’esprit tourné vers un avenir vert. »
Ce ressenti est partagé par Ludovic Weber : « L’objectif clair et ambitieux que donne la Chine en termes de durabilité s’aligne avec les intérêts du pays, du fait des coûts majeurs qu’elle subirait si elle ne prenait pas d’actes forts : montée des eaux avec beaucoup de mégapoles côtières, stress hydrique, etc. » Cela fait référence à l’objectif double de la Chine d’atteindre le pic carbone avant 2030 et la neutralité carbone avant 2060. Dans le cas de Saint-Gobain, « cela nous offre de belles perspectives de croissance de nos solutions pour la construction durable, les véhicules électriques, les céramiques haute performance pour les vitrages photovoltaïques, ou encore les fibres de verre pour éoliennes, etc. », se réjouit-il. En résumé, « un développement plus qualitatif sur le plan des standards, du respect de l’environnement ou des classes les moins aisées ».